Tu cesseras de craindre ...

Sénèque
Tu cesseras de craindre quand tu cesseras d’espérer  


Faut-il pour autant cesser d’espérer ?
Espérer n'est-ce pas un moteur de vie ?
Ne pouvons-nous espérer sans crainte ?
L'espérance n'est-elle pas le propre de l'homme ?

Je pourrais me lancer dans le labyrinthe de questions que nous proposes mais je sais d'avance que si je le fais je resterais conditionné par mes déductions qui feraient appel à ma raison et ses lacunes. J'ai un autre chemin pour ne pas trop me perdre dans un dédale de réponses stériles.

Nous portons en nous la joie sans objet, elle est naturellement une espérance mais qui ne s'appuie sur aucune réalité concrète.

J'ai évoqué récemment sur le forum caché de ce forum public que j'avais fait un jour l'expérience de la " crainte de Dieu " et en avais conclu que cette crainte si particulière et qui n'est pas crainte au sens ordinaire, supprimait toutes les autres craintes. C'est loin d'être en moi un état permanent que cette crainte de Dieu mais je crois que c'est la seule réponse, avec cette joie sans objet que j'appelle aussi " bonne nouvelle " parce qu'on a le sentiment de quelque chose de déjà en accomplissement qui dépasse la notion d'espérance supposant quant à elle une projection dans le futur donc dans un univers d'illusions.

L'espérance provoque trop souvent un écart entre attente et réalité d'où une double crainte : celle de se tromper et celle de ne pas obtenir.

Cette joie sans objet dont je parle est une joie sans savoir de quoi il s'agit et comme elle est sans objet, la joie est consommée, peu importe si cela concerne notre réalité tangible ou notre réalité psychique.

Jean

Je te remercie infiniment Jean
Nous portons en nous la Joie sans objet

le sentiment collé à l'espoir c'est plutôt la déception, la crainte est plutôt liée à des routines de survie
Mais au dela de 2 liens je vois pas trop à quoi ca conduit, de toute façon c'est pas tellement comme si on avait le choix, mère nature ne nous a pas vraiment conçu comme des êtres philosophiques mais plutôt comme des êtres basiquement soumis à ses injonctions

l'Espoir et la crainte vont de paire et semblent indissociables !
La crainte pourtant ne sert à rien , juste elle nous ronge un peu ou beaucoup selon chacun ..
Mais l'espérance , l'espoir , nous gonfle le coeur , souffle du vent sur nos voiles , nous pousse
L'espérance a peur des revers ? l'espérance est bien fragile . L'espérance est incertaine c'est sûr ..
Le proverbe dit " L'espoir fait vivre " ! oui l'espoir fait vivre et tant pis pour la crainte qui lui grignote un peu les contours comme toujours

Il est certain que si nous restons dans les termes de la citation, nous généralisons. Hakaan souligne que la crainte est davantage dans le champ des conséquences vitales, je dirais fâcheuses. En philo on distingue bien peur et crainte, la peur est viscérale et la crainte dépend des idées que nous nous forgeons.

L'espérance, en terme de projet mené, et je reviens sur l'apport d'Hakaan sur la notion de sentiment, nécessite évaluer ce que l'on investit dans un projet ou une action. Si les attentes sont réalistes, nos craintes le sont aussi, si nous avons des attentes démesurées nos craintes suivront cette démesure. L'auteur nous invite donc à envisager la raison comme intermédiaire entre la subjectivité qu'il y a dans toute espérance et la réalité des faits cause de la crainte.

Cette notion d'espérance d'un point de vue philosophique renvoie aussi à ce que nous ne maîtrisons pas. Il y a les choses qui dépendent de nous et celles qui ne dépendent pas de nous, nous dit le vieil adage. Dans ces conditions, qui y a-t-il a craindre quand nous savons que toute espérance repose sur des incertitudes ? Cela reviendrait à craindre l'inconnu ou la fatalité. Pour l'un nous sombrions dans la crainte de l'indétermination (angoisse existentielle) et pour l'autre de la superstition plus ou moins consciente.

Jean

Hum , " Tu craindras l'Eternel, ton Dieu " Deutéronome 6:13  
" Or maintenant ces trois choses demeurent: la foi, l'espérance, l'amour; mais la plus grande de ces choses, c'est l'amour." 1 Corinthiens 13-13 , love .

Professeur X a écrit:Hum , " Tu craindras l'Eternel, ton Dieu " Deutéronome 6:13  
" Or maintenant ces trois choses demeurent: la foi, l'espérance, l'amour; mais la plus grande de ces choses, c'est l'amour." 1 Corinthiens 13-13 , love .

Oui, citation judicieuse
Il se trouve que lorsqu'on expérimente la crainte de Dieu c'est forcément une expérience de l'espérance. Cette crainte " redimensionne " notre rapport entre Dieu et soi.

J'ai regardé une vidéo sur la crainte de Dieu mais il ne m'a pas semblé qu'on insistait sur le côté non intentionnel de cette crainte, ceci parce que cette expérience n'est pas volontaire, elle s'impose au travers de circonstances qui nous sollicitent si j'en crois mon vécu. De toute façon dans un tel moment où l'on est tourné vers Dieu c'est parce que nous espérons.

Jean

Rien n'est plus aliénant que l'espoir et l'attente quant bien même ils seraient satisfaits. C'est le lit de la souffrance et de la dépendance.
Si la crainte s'inclue dans le phénomène de peur en tant que stratégie de survie de l'espèce humaine alors vivre juste le moment pleinement, en zappant une à une toutes les propositions mentales de projection et d'hypothèque sur un futur idéal qui se présentent, permet de maîtriser complètement cette pulsion de survie, après un passage délicat dans l'inconfort ressenti qu'on apprend peu à peu à domestiquer.

Le cheminement que tu évoques est un renoncement à ses projections source d'illusions et donc de souffrance par dé-espoir.

Il existe une autre voie à travers la citation de Professeur X qui est de trouver l'espérance non pas en tant qu'espoir selon des attentes d'un ordre cognitivo-affectif mais espérance portée par la foi. Il ne s'agit plus d'un raisonnement mais d'une expérience qui conduit à  espérer,  croire. Cette espérance n'est pas déterminée par la représentation d'un objet désiré mais d'après moi par ce qui nous dépasse et qui est intrinsèquement en chacun.

J'ai parlé dans mon premier message de ce topic de la joie sans objet, et, déjà sans aucune référence à la spiritualité, cette joie nous anime comme-ci nous avions reçu une très bonne nouvelle. C'est une réaction que je qualifie de physiologique qui me fait dire qu'au fond de nous, sans aucune philosophie ou religion nous pouvons nous sentir très heureux au point de vouloir s'imaginer une causalité extérieure à nous-mêmes.  Mais après quelques expériences de cette joie sans objet j'avais compris qu'il n'y avait nul besoin d'objet. Joie et espérance étant en quelque sorte la même chose ici, deux idées pour l'ego qui n'en sont qu'une ou alors deux choses indissociables, consubstantielles, alors que le moi distingue son espérance qui précède sa joie, mais le plus souvent sa tristesse parce que ses attentes s'éloignent trop de la vie naturelle ( pour mon développement ici ) ou de la vie surnaturelle ( selon ce que j'avance plus haut ).

Jean

Pour ma part j'ai toujours considéré l'espoir comme la pire des souffrances, c'est vraiment une pensée à laquelle je ne m'adonne plus (je l'ai fait dans ma jeunesse).

A chaque fois qu'un peu d'espoir pointe son nez, je le rabroue vertement, en essayant de profiter du moment présent et des biens que j'ai (biens au sens large, pas au sens matériel) ; Dans les pires moments, je me plains, mais je garde l'espoir loin de moi, c'est, et de loin, le sentiment qui m'apparaît le plus cruel en ce bas-monde.

En plus avoir de l'espoir m'a séparé de Dieu, dans ma jeunesse je priais Dieu avec beaucoup d'espoir, et comme j'ai été déçue, je me suis mise à arrêter de croire, alors maintenant je ne fais plus cette erreur, je prie pour les autres et non plus pour moi, comme ça je n'ai plus la déception en Dieu, c'est toujours ça de pris.

L'espoir ne serait-il la foi handicapée ?

On croit mais pas tout a fait ?

Pourtant la théologie la considéré comme une des trois virtues théologales qui se situe entre la foi et l'agapé.

En même temps, c'est l'espoir qui est le bateau qui traverse les océans pour ramener sur les terres fermes de la foi .

C'est là la nuance entre l'espoir et l'espérance : l'espoir est un rêve incertain basé sur la crainte alors que l'espérance est la foi confiante en l'avenir. Cette dernière ne formule pas de souhaits précis car elle remet toute chose aux mains de Dieu qui connaît mieux que nous ce dont nous avons besoin.

Les messages de ce topic m'avaient laissé sur la réflexion qu'il y a des significations différentes entre ce qui relève d'une pensée nationaliste ou d'une une pensée spirituelle.

Plusieurs fois, dans divers topics, j'ai pu observer la confusion avec " la crainte de Dieu ", pensée comme une crainte qui relève de l'égocentrisme et donc d'une définition rationaliste faite de peurs.

Dans une vision religieuse ou spirituelle il y a une sublimation à saisir dans les mots sinon le sens des choses nous échapperait parce qu'emprisonné dans la raison dite objective alors que cette raison ne s'applique pas avec décence à la spiritualité.

Elea évoque bien cela avec l'espérance qui est confondue souvent avec l'espoir qui est une sorte de calcul, de spéculation, sur des faits futurs qui ne peuvent être qu'imaginaires dans l'instant alors que l'individu porteur d'un espoir peut se croire rationnel. " Être " dans l'espérance c'est déjà être dans la joie alors qu' " avoir " de l'espoir est un tiraillement en soi, celui de l'incertitude.

Jean