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Simone Weil, philosophe

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Message par Kolam Lun 14 Mai 2018 - 11:20

Rappel du premier message :


Simone Weil, philosophe



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Biographie:



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"Entre deux hommes qui n'ont pas l'expérience de Dieu,
celui qui le nie en est peut-être le plus près."

La Pesanteur et la Grâce (1947).



"Dieu ne peut être présent dans la création que sous la forme de l'absence."
La Pesanteur et la Grâce (1947).


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(A ne pas confondre avec sa quasi-homonyme)

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Message par Sod Sam 12 Aoû 2023 - 8:13

"Et après avoir parlé de cette rencontre extraordinaire avec le Christ, elle [Simone Weil] note dans "Attente de Dieu" :

"C'est après cela que j'ai sentis que Platon est un mystique, que toute L'Iliade d'Homère est baignée de lumière chrétienne et que Dionysos et Osiris sont d'une certaine manière le Christ lui même"

Réponses aux questions de Simone Weil


Je découvre cet auteure depuis hier et son cas est troublant : Simone Weil était athée jusqu'à ce que, comme elle le dit elle même "le christ est descendu et m'a prise".

Lorsque Dieu parle a quelqu'un il s'adresse a lui dans son langage

"Dieu m'avait miséricordieusement empêchée de lire les mystiques afin qu'il me fut évident que je n'avais pas fabriqué ce contact absolument inattendu"

Simone Weil Attente de Dieu

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Message par Sod Mar 15 Aoû 2023 - 8:42

Rectificatif : Contrairement a ce que j'ai dit, Simone Weil n'était pas athée avant d'avoir son expérience ou selon ses propres mots "le Christ est descendu et l'a prise", elle était agnostique, ce qui est bien différent.

Avant d'avoir son expérience, comme c'est une femme intelligente, agrégée de philo, elle avait bien compris que la question de l'existence de Dieu est de la plus haute importance, mais vu que la question dépasse nos compétences, elle estimait que "le mieux était de ne pas la poser."

Mais après qu'elle ait eut cette expérience troublante de sa rencontre avec le Christ, elle dit elle même qu'elle n'avait pas envisagé que la question puisse se régler comme ça, "par une rencontre de personne a personne avec le Christ", ici sur Terre, au cours de la vie incarnée, alors que bien évidemment c'est le meilleur moyen de régler la question, en tout cas un moyen très efficace, la preuve.

Ensuite elle s'est mise a écrire toutes sortes de choses sur le sujet et le dois bien reconnaitre que je n'y comprend pas grand chose. Quand j'ai posté samedi je venais juste de la découvrir, par une de ses lettres qui m'avait beaucoup plut, et maintenant que je connais un peu mieux ce qu'elle raconte, il faut bien reconnaitre que j'ai beaucoup de mal avec ce qu'elle dit, souvent ce n'est pas clair et elle va un petit peu trop du coté du dolorisme pour moi, sans y aller carrément mais ça ressemble...

C'est là que son cas est très intéressant : Je ne doute pas une seule seconde de la réalité de sa rencontre avec le Christ, son agnosticisme d'avant étant même un bon argument de crédibilité, (si j'avais eut besoin d'argument) et cependant, maintenant que j'ai passé le week end à la lire un petit peu, je ne valide pas grand chose de ce qu'elle raconte sur le sujet, ce qui vient peut être simplement du fait que je ne comprend pas.

Ceci dit cette dimension du christianisme est très intéressante : dans le domaine des idées que l'on développe sur le sujet même après une expérience puissante, chacun est chrétien à sa façon, même si bien sur, dans les 99 % de différences avec autrui, il y a forcément aussi le 1 % de similaire.

Affaire a suivre...

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Message par ness Mar 15 Aoû 2023 - 9:07

J'ai entendu son témoignage poignant sur les camps d’Auschwitz, ou elle raconte son expérience d'enfant.
dans un documentaire qui a retracé, grâce a des détails de survivants et des lettres ou des dessins d'artiste l'enfer de l'extermination.
Il y avait bien en elle une "douleur", une blessure qui n'a jamais été cicatrisé, car trop profonde, ou comme une cicatrice qui reste ; ce qu'on appelle la mémoire brûlante.

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Message par Sod Mar 15 Aoû 2023 - 9:26

C'est aussi l'impression que j'ai en la lisant : c'était une grande souffrante, et d'ailleurs je crois me souvenir que sa rencontre avec le Christ s'est justement faite en ressentant Son Amour dans la souffrance, même s'il faudrait que je retrouve sa phrase précise pour ne pas dire de bétise.
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Message par Sod Mer 16 Aoû 2023 - 8:18

"Comme je vous l’ai écrit, le Christ lui-même est descendu et m’a prise. Dans mes raisonnements sur l’insolubilité du problème de Dieu, je n’avais pas prévu la possibilité de cela, d’un contact réel, de personne à personne, ici-bas, entre un être humain et Dieu. J’avais vaguement entendu parler de choses de ce genre, mais je n’y avais jamais cru. »

Simone Weil - Autobiographie spirituelle - Lettre au Père Joseph Marie Perrin du 14 Mai 1942
https://www.les-philosophes.fr/simone-weil/autobiographie-spirituelle.html
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Message par jean123 Mer 16 Aoû 2023 - 9:16

ness a écrit:J'ai entendu son témoignage poignant sur les camps d’Auschwitz, ou elle raconte son expérience d'enfant.
dans un documentaire qui a retracé, grâce a des détails de survivants et des lettres ou des dessins d'artiste l'enfer de l'extermination.
Il y avait bien en elle une "douleur", une blessure qui n'a jamais été cicatrisé, car trop profonde, ou comme une cicatrice qui reste ; ce qu'on appelle la mémoire brûlante.
Comme il s'agit de Simone Weil on peut comprendre le lien entre souffrance et rencontre avec Dieu !


Dernière édition par jean123 le Mer 16 Aoû 2023 - 12:52, édité 1 fois

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Message par Kolam Mer 16 Aoû 2023 - 11:33

Like a Star @ heaven P.S: Il s'agit d'un topic au sujet de Simone Weil (1909 - 1943), philosophe, humaniste et militante politique française et non pas au sujet de Simone Veil (1927 - 2017), magistrate et femme d’État française.
Sa biographie figure dans le post d'ouverture du topic, ainsi qu'une annotation discrète en bas: "A ne pas confondre avec sa quasi-homonyme"
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Message par Sod Jeu 17 Aoû 2023 - 9:05

« Vous dites que je paye mes qualités morales par la défiance envers moi-même. Mais l’explication de mon attitude envers moi-même, qui n’est pas de la défiance, qui est un mélange de mépris, de haine et de répulsion, se situe plus bas, au niveau des mécanismes biologiques. C’est la douleur physique. Depuis 12 ans je suis habité par une douleur située autour du point central du système nerveux, du point de jonction de l’âme et du corps, qui dure à travers le sommeil et n’a jamais été suspendue une seconde.

Pendant dix ans elle a été telle, et accompagné d’un tel sentiment d’épuisement, que le plus souvent mes efforts d’attention et de travail intellectuel étaient a peu près aussi dépourvus d’espérance  que ceux d’un condamné a mort qui doit être exécuté le lendemain. Souvent beaucoup plus, quand ils apparaissaient tout à fait stérile et sans fruits même immédiats. J’étais soutenue par la foi, acquise a l’âge de 14 ans, que jamais aucun effort de véritable attention n’est perdue, même s’il ne doit jamais avoir ni directement ni indirectement aucun résultat visible. Pourtant un moment est venu où j’ai cru être menacée, par l’épuisement et par l’aggravation de la douleur, d’une si hideuse déchéance de toute l’âme que pendant plusieurs semaines je me suis demandé avec angoisse si mourir n’était pas pour moi le plus impérieux des devoirs, quoi qu’il me parut affreux que ma vie dut se terminer dans l’horreur. Comme je vous l’ai raconté, seule une résolution de mort conditionnelle et a terme m’a rendu la sérénité.

Peu de temps auparavant, étant déjà depuis des années dans cet état physique j’avais été ouvrière d’usine, près d’un an, dans des usines de mécanique de la région parisienne. La combinaison de l’expérience personnelle et de la sympathie pour la misérable masse humaine qui m’entourait et avec laquelle j’étais, même a mes propres yeux, indistinctement confondue, a fait entrer si avant dans mon cœur le malheur de la dégradation sociale que depuis lors, je me suis toujours sentie une esclave, au sens que ce mot avait chez les Romains.

Pendant tout cela le mot même de dieu n’avait aucune place dans mes pensées. Il n’en a eu qu’à partir du jour, il y a environ trois ans et demi où je n’ai pas pu la lui refuser. Dans un moment d’intense douleur physique, alors que je m’efforçais d’aimer, mais sans me croire le droit de donner un nom a cet amour, j’ai sentis, sans y être aucunement préparé – car je n’avais jamais lut les mystiques – une présence plus personnelle, plus certaine, plus réelle que celle d’un être humain, inaccessible et aux sens et à l’imagination, analogue à l’amour qui transparait a travers le plus tendre sourire d’un être aimé. Depuis cet instant, le nom de dieu et celui du Christ se sont mêlés de plus en plus irrésistiblement à mes pensées.

Jusques là ma seule foi avait été l’amor fati des stoïciens, tel que l’a comprit Marc Aurèle et je l’avais toujours fidèlement pratiqué. L’amour pour la cité de l’univers, pays natal, patrie bien aimée de toute âme, chérie pour sa beauté, dans la totale intégrité de l’ordre et de la nécessité qui en sont la substance, avec tous les événements qui s’y produisent.

Le résultat a été que la quantité irréductible de haine et de répulsion liée à la souffrance et au malheur s’est entièrement retournée sur moi-même. Et c’est une très grande quantité, parce qu’il s’agit d’une souffrance présente à la racine même de chaque pensée sans aucune exception. C’est au point que je ne peux absolument m’imaginer la possibilité qu’aucun être humain éprouve de l’amitié pour moi. Si je crois en la votre, c’est seulement pour autant qu’ayant confiance en vous et ayant reçut de vous l’assurance de cette amitié, ma raison me dit d’y croire, mais pour mon imagination elle n’en est pas moins impossible. »

Lettre à Joë Bousquet du 12 mai 1942
http://www.arsmagica.fr/sites/default/files/Textes/Weil_Bousquet_12_mai_1942.pdf


Mon regard sur certaines des choses qu'elle dit dans cette lettre changera peut être un jour, mais pour l'instant, il contient par endroit ces choses qui ne sont pas trop possibles pour moi et que j'appel du dolorisme, ou bien une fascination pour le mal, ou bien encore du masochisme... voir de la cruauté quand on sait que le destinataire de cette lettre était un blessé grave de la guerre de 14 vivant paralysé sur son lit et sous morphine depuis 20 ans.

Si j'aborde ces choses un peu délicates, ce n'est pas du tout pour dénigrer / discréditer Simone Weil ni son oeuvre, car je sais bien que le meilleur et le pire peuvent cohabiter dans la même personne. C'est uniquement histoire d'exercer mon discernement sur le fait qu'avoir une expérience du Christ n'exclut pas de continuer a avoir des pensées complètement tordues - en espérant me tromper sur le cas de Simone Weil mais que ce serait simplement moi qui voit certaines choses de travers dans ce qu'elle dit.

Votre avis m'intéresse sur ce point là si vous lisez cette lettre a Joë Bousquet.

Like a Star @ heaven Une page a partir de laquelle il est possible de télécharger son livre intitulé "Attente de Dieu", ou il y a aussi dans de nombreux endroit beaucoup de choses intenable pour moi.

http://classiques.uqac.ca/classiques/weil_simone/attente_de_dieu/attente_de_dieu.html
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Message par Sod Ven 18 Aoû 2023 - 10:36

Comment ne pas être bouleversé profondément par une enfant de cinq ans qui refuse de manger du sucre pour envoyer sa part aux soldats de la guerre de 14 qui sont au front ?

Comment ne pas saluer le courage d’une jeune agrégée de philo quittant son poste d’enseignante pour aller travailler en usine pendant un an afin d’éprouver dans sa propre vie l’oppression sociale des opprimés ?

Comment ne pas tirer son chapeau a quelqu’un qui partage son salaire avec les chômeurs ?

Mais comment ne pas être tout à la fois admiratif et un peu stupéfait devant quelqu’un qui voudrait aller en prison pour y faire connaissances avec les prostitués et tous les délinquants ?

« Arrêtée pour Gaullisme [pendant la guerre] longuement interrogée, menacée de prison, « où elle, agrégée de philosophie, serait mêlée aux prostituées » elle faisait cette sensationnelle réponse : « j’ai toujours désiré connaitre ce milieu et pour y entrer je n’ai jamais vu qu’il puisse y avoir pour moi un autre moyen que celui là : la prison »

A ces mots, le juge de faire signe a son secrétaire de la relâcher comme folle. »

Père Joseph Marie Perrin - Introduction à Attente de Dieu


La biographie de Simone Weil contient souvent ce genre comportements assez rares pour être signalés. Certainement ils sont le fait d’une grande âme compatissante et charitable. Vouloir connaitre et partager la vie de souffrance des souffrants a bien sur quelque chose de christique, car lui-même trainait avec tous les miséreux. Mais ce que m’ont apporté les conférences de contre histoire de la philosophie de Michel Onfray, c’est que souvent, l’œuvre s’explique par la biographie, du moins les idées principale d’une œuvre peuvent s’expliquer par certains événement marquant de la vie de l’auteur et c’est pour ça qu’hier j’ai posté l’extraits de cette lettre a Joë Bousquet ou il est question de la place de la souffrance sur le chemin de Simone Weil, thème qui est mentionné ailleurs aussi :

« En 1938 j’ai passé dix jours a Solesme, du dimanche des rameaux au mardi de Pâques, en suivant tous les offices. J’avais des maux de tête intenses, chaque son me faisait souffrir comme un coup et un extrême effort d’attention me permettait de sortir  hors de cette misérable chair, de la laisser souffrir seule, tassée dans un coin et de trouver une joie pure et parfaite dans la beauté inouïe du chant et des paroles. Cette expérience m’a permis par analogie de mieux comprendre la possibilité d’aimer l’amour divin à travers le malheur. Il va de soi qu’au cours de ces offices, la pensée de la Passion du Christ est entrée en moi une fois pour toutes. Il y avait là un jeune anglais catholique qui m’a donné pour la première fois l’idée d’une vertu surnaturelle des sacrements, par l’éclat véritablement angélique dont il paraissait revêtu après avoir communié »

Autobiographie spirituelle - Lettre au Père Joseph Marie Perrin du 15 Mai 1942


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Message par Sod Sam 19 Aoû 2023 - 9:07

DE QUOI PARLE SIMONE WEIL EN CROYANT QU’IL Y AURAIT UNE FOLIE DE DIEU ?

« En méditant sur la notion de médiation – que celle-ci revête exemplairement le figure de l’âme du monde, ou que sur le plan de la religion révélée elle soit endossée par la Christ – Simone Weil a scruté le mystère de la souffrance et de la Croix. Par sa double nature, corporelle et spirituelle, l’Homme est à l’intersection du naturel et du surnaturel du fini et de l’infini. C’est une crucifixion pour un être qui pense et qui est fait « pour habiter l’éternité » d’être lié à un sujet fini, soumis à la nécessité, à l’espace et au temps. « Une admirable image qu’on trouve chez les manichéens » celle de l’esprit « déchiré, mis en morceaux, dispersé à travers l’espace » livre une porte d’accès au mystère de cette discordance. C’est pour Simone Weil  se retrouver au cœur même du problème du Mal. Elle développe cette intuition, au début 1941,  dans un des premiers textes qu’elle consacre à la science : « la science et nous » :

« D’après une admirable image qu’on trouve chez les manichéens et qui remonte certainement beaucoup plus haut, l’esprit est déchiré, mis en morceau dispersé a travers l’espace, a travers la matière étendue, à travers la matière étendue. Il est crucifié sur l’étendue et la croix n’est elle pas le symbole de l’étendue, étant faite des deux directions perpendiculaires qui la définisse ? L’esprit est aussi crucifié sur le temps, dispersé en morceaux à travers le temps et c’est le même écartèlement ».

Le rapprochement opéré par Déodat Roché dans sa contribution au « Génie d’Oc », de la doctrine manichéenne avec le mythe platonicien de la création du monde tel qu’il est exposé dans le Timée de Platon (36b – 37a) ne manque pas de jeter une vive lumière pour Simone Weil, qui, s’engouffrant dans cette voie spéculative, rapproche le drame de la Création, crucifixion de l’esprit sur l’étendue, de celui de la Passion. Il faut voir là chez elle comme un nouveau bond de la pensée. Un même mystère unit pour elle la Création, l’Incarnation, la Passion, qui « constituent ensemble la folie propre à Dieu ». Folie de Dieu « déjà contenue toute entière dans l’acte de créer »

Florence de Lussy Introduction aux œuvres complètes de Simone Weil

« La faculté qui dans l’Homme regarde la force la plus brutale, comme on regarde un tableau, en la nommant nécessité, cette faculté n’est pas ce qui dans l’Homme appartient a l’autre monde. Elle est à l’intersection des deux mondes. La faculté qui n’appartient pas à ce monde est celle du consentement. L’Homme est libre de consentir ou non à la nécessité. Cette liberté n’est actuelle en lui que lorsqu’il conçoit la force comme nécessité, c'est-à-dire lorsqu’il la contemple. Il n’est pas libre de consentir à la force comme telle. L’esclave qui voit le fouet se lever sur lui ne consent pas, ne refuse pas son consentement, il tremble. Pourtant, sous le nom de nécessité, c’est bien à la force brutale que consent l’Homme lorsqu’il consent, c’est bien au fouet. Aucun mobile, aucun motif ne peut être suffisant pour un tel consentement. Ce consentement est une folie, la folie propre a l’Homme, comme la Création, l’Incarnation et la Passion constituent ensemble la folie propre à dieu. Les deux folies se répondent. Il n’est pas surprenant que ce monde soit par excellence le lieu du malheur, car sans le malheur perpétuellement suspendu, nulle folie de la part de l’Homme ne pourrait faire écho à celle de Dieu qui est déjà contenue toute entière dans l’acte de créer »

Simone Weil - Commentaire de textes pythagoriciens P 613 des Œuvres complètes
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Message par Sod Dim 20 Aoû 2023 - 12:28

« Le degré de probité intellectuel qui est obligatoire pour moi en raison de ma vocation propre, exige que ma pensée soit indifférente à toutes les idées sans exception, y compris par exemple le matérialisme et l’athéisme, également accueillante et également réservée à l’égard de toutes »

Simone Weil – Lettre a Solange Beaumier

Il faut interpréter cette déclaration comme la charte d’une sorte de « service de l’intelligence » comme on dit « service de dieu ». Simone Weil assume librement et pleinement une « position d’équilibre instable » à l’intersection de tous les courants de pensées. Elle sera donc un passeur – un médiateur- pour cette « pensée identique » qui selon elle court a travers toutes les civilisations :

« je crois qu’une pensée identique se trouve exprimée, d’une manière très précise et avec des modalités à peine différente dans les mythologie antiques, dans la philosophie de Phérékydès, Thalès, Anaximandre, Héraclite, Pythagore, Platon et des stoïciens Grecs, dans la poésie grecque de la grande époque, dans le folklore universel, dans les Upanishad Hindoues et la Bhagavad Gita, dans les écrits des taoïstes chinois et dans certains courants bouddhistes, dans ce qui reste des écritures sacrées d’Egypte, dans les dogmes de la foi chrétienne et les écrits des plus grand mystiques chrétiens, surtout Jean de la croix, dans certains hérésies, surtout la tradition cathare et manichéenne »

Simone Weil -  Lettre au philosophe Jean Wahl octobre 1942


Mais cette « pensée unique », creuset de la vérité, « a besoin d’être exprimée a travers la seule chose à peu près bonne que nous ayons en propre, a savoir la science » Ainsi, dans une vision d’universelle analogie, où elle voit « presque l’analogue d’une révélation nouvelle de l’univers et de la destinée humaine », Simone Weil privilégie la science , comme le fit au 15ème siècle Nicolas de Cuse dans un chapitre de la docte ignorance, et culminant au sein de celle-ci, la géométrie (« Dieu est un perpétuel géomètre ») avec en son cœur la notion de médiation. »

« En considérant les religions comme « la traduction en langages différents de la grande Révélation », Simone Weil s’inscrit dans la grande tradition humaniste et privilégie un « jadis », celui de l’antiquité préchrétienne qui brilla de tous ses feux dans les derniers siècles qui précédèrent la venue du Christ, et dont maints érudits manifestèrent la nostalgie. Dans la logique de cet a-chronisme [qui ne tient pas compte du temps] elle envisage sans broncher d’autres figures du christ évoquant même le caractère plus que plausible d’autres incarnations, à l’instar d’un Schelling prônant un messianisme païen, réplique et homologie de l’histoire sainte. Hercule, Osiris ou Dionysos deviennent dans cette optique des sortes de « métastases du Christ ». Analogie, allégories figures et rapprochements, plus ou moins hasardeux, sont les outils d’une exploration en tous sens des sources antiques ou …primordiales, conduisant à invoquer des personnages (ou personnification) des temps immémoriaux, tels Hénoch, Noé, ou Melchisedek . La méthode est celle d’une projection dans l’éternel :

« L’histoire de Prométhée c’est l’histoire même du christ projeté dans l’éternel »

Simone Weil - Lettre a un religieux - Novembre 1942


Le parcours de Simone Weil se trouve par là éclairé : par la voie des grands mythes légués par l’antiquité, elle assimile les trésors de la spiritualité des religions a mystères (du moins ce qu’on peut en supputer) synthétisés dans la figure d’Orphée, qui souffre meurt et ressuscite. Simone Weil avait dans sa bibliothèque personnelle l’ouvrage de d’André Boulanger « Orphée, Rapport de l’Orphisme et du christianisme » parut en 1925. Dans cette lignée, le passage au christianisme s’effectue par le truchement de la redécouverte d’un Platon mystique, dont la sublimité de la doctrine et des mythes se retrouve dans la proximité presque immédiate – comme en une gémellité – du message d’amour, jusque dans le supplice de la croix, apporté par le Christ. Passage donc par un saut dans le transcendant qui, seul, permet de combler la « distance entre l’essence du nécessaire et celle du Bien » (Platon République 493c) »

Florence de Lussy Introduction aux œuvres complètes de Simone Weil


Voilà : peut être que d'autre que Simone Weil l'ont fait aussi, mais elle l'a fait c'est sur, elle a fait entrer l'idée d'une Sophia perennis dans une collection de philo très érudite chez ce grand éditeur qu'est Gallimard.
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Message par Kolam Lun 21 Aoû 2023 - 11:27


Simone Weil, philosophe - Page 2 Simone10


Extraits exclusifs de "Simone Weil, la vérité pour vocation", de Ludivine Benard.
(Par Le Comptoir le 2 mars 2020.):


https://comptoir.org/2020/03/02/extraits-exclusifs-de-simone-weil-la-verite-pour-vocation/


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Message par Sod Mar 22 Aoû 2023 - 7:18

Kolam a écrit:"Simone Weil, la vérité pour vocation"

Ce matin en buvant mon café je me suis justement dit que j'allais en venir a ce thème très présent dans son oeuvre : sa façon de considérer la vérité.

« J’éprouve un déchirement qui s’aggrave sans cesse, à la fois dans l’intelligence et au centre du cœur, par l’incapacité où je suis de penser ensemble dans la vérité le malheur des Hommes, la perfection de Dieu et le lien entre les deux. J’ai la certitude intérieure que cette vérité, si elle m’est jamais accordée, me le sera seulement au moment où je serai moi-même physiquement dans le malheur, et dans une des formes extrêmes du malheur présent »

Simone Weil - Ecrits de Londres (1942 - 1943)


Malheureusement j'ai peu copié les très nombreux passages où elle parle de la vérité, précisément du moteur que serait le désir de trouver la vérité. Mais ce dont je me souviens - j'espère que je retrouverai ce passage - c'est le moment ou elle dit qu'il suffit de désirer puissamment la vérité pour entrer un jour dans le Royaume éternel, quelle que soient les capacités intellectuelles et la culture de la personne qui a ce désir.

Ce qui est confirmé par l'Illumination de quelques analphabètes célèbres : Mahomet Ramakrishna, Catherine de sienne.
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Message par Sod Mer 23 Aoû 2023 - 7:16

« Le christ aime qu’on lui préfère la vérité, car avant d’être le Christ il est la vérité. Si on se détourne de lui pour aller vers la vérité, on ne fera pas un long chemin sans tomber dans ses bras »

« Je me suis toujours interdit de penser a une vie future, mais j’ai toujours cru que l’instant de la mort est la norme et le but de la vie. Je pensais que pour ceux qui vivent  comme il convient, c’est l’instant où pour une fraction infinitésimale de temps la vérité pure, nue, certaine, éternelle entre dans l’âme. Je peux dire que jamais je n’ai désiré pour moi  un autre bien. Je pensais que la vie qui mène a ce bien n’est pas définie seulement par la morale commune, mais que pour chacun elle consiste en une succession d’actes et d’événements qui lui est rigoureusement personnelle, et tellement obligatoire que celui qui passe à coté manque le but. Telle était pour moi la notion de vocation »

« Après des mois de ténèbres intérieures j’ai eut soudain et pour toujours la certitude que n’importe quel être humain, même si ses facultés naturelles sont presque nulles, pénètre dans ce royaume de la vérité réservé au génie, si seulement il désire la vérité et fait perpétuellement un  effort d’attention pour l’atteindre. Il devient ainsi lui-même un génie, même si faute de talent ce génie ne peut pas être visible à l’extérieur »

Simone Weil - Autobiographie spirituelle
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Message par ness Mer 23 Aoû 2023 - 9:32

Merci pour votre partage, je ne connaissais pas cette personne.
Simone Weil, philosophe - Page 2 2030499250  je me suis trompée de Simone..
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Message par Sod Jeu 24 Aoû 2023 - 6:22

ness a écrit: je ne connaissais pas cette personne.

Moi non plus.
Je ne la connais toujours pas et ne je la connaitrais jamais, mais je dois bien reconnaitre que c'est elle en tant que personne qui m'intrigue, c'est son chemin spirituel, c'est la question : qui était-elle donc pour raconter ce genre de choses ?

Comme elle a quitté ce bas monde depuis longtemps, sans doute est-elle maintenant en paix dans le monde de la Lumière, donc à vrai dire si j'ai de la peine en visitant son oeuvre ainsi que sa biographie depuis une dizaine de jours, ce n'est pas pour elle que je suis en souci, mais pour ceux qui vivraient le christianisme de cette façon.

Etant donné qu'elle fut « prise » par le Christ seulement cinq ans avant de passer vers l'Autre Monde, alors qu'avant elle était agnostique, je crois qu'elle n'a guère eut le temps de développer sa spiritualité vers autre chose que les idées qui l'occupaient déjà avant qu'elle ne fut « prise », notamment l'impuissance devant le malheur omniprésent dans la vie des terriens. Comme si ses idées sur la spiritualité était une tentative de parler en termes chrétiens de ce drame humain qu'est souvent une incarnation sur Terre.

C'est là ou je ne peut pas la rejoindre, même si le personnage a quelque chose de fascinant : parce que ma spiritualité aura toujours servit a me soigner et pas a m'expliquer mon malheur.

Mais pour l'instant nul part je n'ai vu dans ce qu'elle raconte que sa « prise » par le Christ lui aurait permit de résoudre quoi que ce soit, même si je n'oublis pas que ça a put lui arriver quand même, sauf qu'elle n'en aurait pas parlé, ou que je ne serais pas encore tomber dessus.

Un exemple de ce genre d'idées, mais dans le domaine de la politique de la révolution, écrit quatre ans avant qu'elle ne fut « prise », dans un des rares textes qu'elle avait prévu de publier :

« Toutes les fois que les opprimés ont voulu constituer des groupements capables d'exercer une influence réelle, ces groupements, qu'ils aient eu nom partis ou syndicats, ont intégralement reproduit dans leur sein toutes les tares du régime qu'ils prétendaient réformer ou abattre, à savoir l'organisation bureaucratique, le renversement du rapport entre les moyens et les fins, le mépris de l'individu, la séparation entre la pensée et l'action, le caractère machinal de la pensée elle-même, l'utilisation de l'abêtissement et du mensonge comme moyens de propagande, et ainsi de suite. »

Simone Weil 1934 – Réflexions sur les causes de la liberté et l’oppression sociale
http://classiques.uqac.ca/classiques/weil_simone/reflexions_causes_liberte_oppression/reflexions.html


Je crois savoir que Simone Weil, en tant que philosophe politique, est estimée et bien connue des militants de la révolution qui reste a faire. Mais ont-ils bien comprit que parmi toutes les contradictions flagrantes qui habitaient en elle, elle ne croyait pas vraiment en cette possibilité ? ... Alors qu'elle se serait beaucoup occupé de ça tout au long de sa courte vie...

...Bizarre.

Je crois que cette femme était un peu folle et bien sur comme avec K. Dick, c'est ça qui doit me plaire et m'attirer chez elle Very Happy
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Message par ness Jeu 24 Aoû 2023 - 10:34

Sod a écrit:Je ne la connais toujours pas et ne je la connaitrais jamais, mais je dois bien reconnaitre que c'est elle en tant que personne qui m'intrigue, c'est son chemin spirituel, c'est la question : qui était-elle donc pour raconter ce genre de choses ?

une intellectuelle qui est passé dans la spiritualité?


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Message par Sod Ven 25 Aoû 2023 - 6:39

La Consolation

« La certitude que j’avais reçue c’est que quand on désire du pain on ne reçoit pas des pierres. Mais en ce temps là je n’avais pas lut l’évangile. »

Simone Weil  1942 – Autobiographie spirituelle


Ça y est : j’ai fini par trouver dans la vie de Simone Weil un de ces épisodes que (très égotiquement) je tiens pour la véritable spiritualité, au motif que la mienne est constituée de ce genre de moment thérapeutique. En effet : cette certitude qu’elle a reçut n’est pas venue à sa rencontre à n’importe quel moment. Elle est venue la consoler durant un épisode très douloureux de son adolescence qu’elle qualifie elle-même de « désespoir sans fond » durant lequel elle envisageait de mourir « à cause de la médiocrité de ses facultés naturelles ».

Elle souffrait  « de ne pouvoir espérer aucun accès à ce royaume transcendant où les hommes authentiquement grands sont seuls à entrer et où habite la vérité. J’aimais mieux mourir que de vivre sans elle.» ...et pourtant soudain ce fut terminé grâce à cette certitude qui lui donna une grande consolation.

Pour ceux qui voudraient lire tout ce passage, il se trouve page 33 d’Attente de Dieu dans sa version « au format WORD » téléchargeable sur cette page, précisément dans le chapitre intitulé autobiographie spirituelle.

« La certitude que j’avais reçue c’est que quand on désire du pain on ne reçoit pas des pierres. Mais en ce temps là je n’avais pas lut l’évangile. »

Simone Weil  1942 – Autobiographie spirituelle


Pour bien comprendre le chemin spirituel de Simone Weil, il est important de se souvenir qu’à cette époque de son adolescence elle était agnostique, c'est-à-dire ne s’occupait de la question de Dieu a cause de notre incompétence dans ce domaine, et qu’elle est resté agnostique encore pendant quinze ans après cet épisode, jusqu'à ce que le Christ la prenne à l’âge de 29 ans. Quand elle précise qu’a cette époque de son adolescence, elle n’avait pas lut l’évangile, il est aussi important de comprendre que malgré ça, la Consolation qu’elle a reçut ce jours là au moyen de cette « certitude » ressemble bel et bien à un accomplissement de certains versets de l’évangile ou Jésus dit avec Sa Parole Majuscule auto-accomplissante :

« Et moi je vous dis [= il vous arrive que] : demandez et l’on vous donnera, cherchez et vous trouverez, frappez et l’on vous ouvrira. (…) Quel père parmi vous donnera une pierre à son fils s’il lui demande du pain ? (…) Si donc mauvais comme vous l’êtes vous savez donner de bonnes choses a vos enfants, le Père céleste donnera d’autant plus volontiers le saint esprit a ceux qui le lui demande. »

Luc 11 – versets 9 à 13


C’est pour ça que Simone Weil précise qu’à cette époque elle n’avait pas lut l’évangile : parce qu’on peut avoir l’expérience de se faire consoler par Jésus et son enseignement, quand bien même on serait agnostique, que l’on n’a pas lut l’évangile, et qu’au lieu de demander des choses a Dieu on ne fait que les désirer puissamment, mais à la condition sans doute de désirer des trésors spirituels.
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Message par Sod Sam 26 Aoû 2023 - 9:17

Les suites de la Consolation par ce Jésus qui intervient parfois incognito

En plus d’avoir eut le mérite de la sortir de ses ténèbres douloureuses de l’adolescence, le moment de la Consolation a eut un impact sur le restant de sa vie, via cette « certitude » qui lui donna une saine occupation pour les dix ans qui ont suivit. A propos de son désespoir d’adolescente elle dit :

« Je ne regrettais pas les succès extérieurs [les succès de la vie genre réussite sociale], mais de ne pouvoir espérer aucun accès à ce royaume transcendant où les hommes authentiquement grands sont seuls à entrer et où habite la vérité. J'aimais mieux mourir que de vivre sans elle. Après des mois de ténèbres intérieures j'ai eu soudain et pour toujours la certitude que n'importe quel être humain, même si ses facultés naturelles sont presque nulles, pénètre dans ce royaume de la vérité réservée au génie, si seulement il désire la vérité et fait perpétuellement un effort d'attention pour l'atteindre. Il devient ainsi lui aussi un génie, même si faute de talent ce génie ne peut pas être visible à l'extérieur. Plus tard, quand les maux de tête ont fait peser sur le peu de facultés que je possède une paralysie que très vite j'ai supposée probablement définitive, cette même certitude m'a fait persévérer pendant dix ans dans des efforts d'attention que ne soutenait presque aucun espoir de résultats. »

En gros, dans les versets de l’évangile cités hier, Jésus dit que celui qui cherche trouve, qu’il suffit de demander à dieu un trésor spirituel pour le recevoir, et pourtant Simone Weil, ne pouvant rien demander a dieu comme tous les agnostiques, a reçut la Consolation dont elle avait besoin dans le désespoir de son adolescence du seul fait de la désirer puissamment. Donc à propos de cet épisode de son adolescence, j’en conclu qu’elle fait partie de ces gens qui sont contactés par Jésus ou bien soigné par lui – par lui ou par un de ses ouvrier christifiés -  sans savoir que ça vient de lui sur le moment, mais qui comprennent ce qui s’est passé seulement 20 ans plus tard.

Ce genre d’enseignement incognito étant une chose mentionnée au chapitre 24 de l’évangile de Luc : les gens ne reconnaissent pas tout de suite que c’est Jésus qui les avaient accompagnés « sur le chemin ».
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Message par Cerf-volant Sam 26 Aoû 2023 - 10:59

S'abaisser, c'est monter à l'égard de la pesanteur morale. La pesanteur morale nous fait tomber vers le haut.

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Message par Sod Dim 27 Aoû 2023 - 7:11

« Silence de la petite fille dans le conte de Grimm qui sauve les sept cygnes ses frères, silence du Juste dans la prophétie d’Isaïe :

« injurié maltraité il n’ouvrait pas la bouche ».

Silence du Christ.

Une sorte de convention divine, un pacte de Dieu avec lui-même, condamne ici bas la vérité au silence »

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Quand quelqu'un croit comme Simone Weil qu'il y aurait une "folie de Dieu" (voir le message que j'ai posté ici samedi dernier) un peu de bon sens est suffisant pour deviner que c'est de la sienne dont il s'agit, et c'est pareil avec bien d'autres choses que nous attribuons a Dieu, comme par exemple un pacte "condamnant la vérité au silence."

Comme quoi : des erreurs de débutants peuvent tout a fait cohabiter, dans notre façon de parler de ce qu'on croit, avec une expérience puissante et indéniable ou on serait "prit" par le Christ. Moi ça m'a toujours semblé évident mais on oubli souvent les évidences. On peut bien avoir une grande vocation envers la vérité et faire quand même ce genre d'erreur de débutant.
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Message par Sod Dim 3 Sep 2023 - 9:05

« L’âme humaine est exilée dans le temps et dans l’espace qui la privent de son unité. Tous les procédés de purification reviennent à la délivrer des effets du temps, de manière qu’elle parvienne à se sentir presque chez elle dans le lieu de son exil.»

« Nous nous sentons ici bas étranger, déracinés, en exil, de même Ulysse, que des marins avaient transporté durant son sommeil, s’éveillait dans un pays inconnu et désirait sa patrie Ithaque d’un désir qui lui déchirait l’âme. »

Simone Weil – Formes implicites de l’Amour de Dieu


Comme on a tous tendance a prendre notre cas pour une généralité, même si c'est plus ou moins et que ça se soigne, il est compréhensible que Simone Weil dise que « Nous nous sentons ici bas étranger, déracinés, en exil...» alors que bien évidemment c'est seulement certains qui voient leur vie comme ça.
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Message par ness Mar 5 Sep 2023 - 9:54

Cerf-volant a écrit:
S'abaisser, c'est monter à l'égard de la pesanteur morale. La pesanteur morale nous fait tomber vers le haut.
S. W.

Merci.. trés belle citation et si profonde.
Trés beau.
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